Le nucléaire français aurait permis d’éviter 25 années d’émissions totales de CO2

Le nucléaire français aurait permis d’éviter 25 années d’émissions totales de CO2

INFO LE POINT. Alors que l’énergie nucléaire fait un retour en force dans le monde, l’institut Molinari a calculé ses avantages cumulés dans la lutte contre le réchauffement climatique.

Par Géraldine Woessner Publié le 20/12/2023 à 07h00

La centrale nucléaire du Bugey, dans l'Ain, émet 4 grammes de CO2 par kWh d'électricité produit.
La centrale nucléaire du Bugey, dans l’Ain, émet 4 grammes de CO2 par kWh d’électricité produit. © Mourad ALLILI / MAXPPP

« Le nucléaire est de retour en Europe »… et les pays qui le soutiennent prêts à passer à l’offensive. En marge d’un conseil rassemblant, ce 19 décembre à Bruxelles, les ministres européens de l’Énergie, les membres de l’« Alliance du Nucléaire », ce club de 12 nations (et 2 observateurs) favorables à l’atome créé à l’initiative de la France, ont adopté un texte demandant que les prochaines réglementations portant sur la décarbonation du continent respectent la neutralité technologique.
« La Commission doit traiter sur un pied d’égalité l’énergie nucléaire et l’énergie renouvelable, pour tous les futurs textes européens », a appuyé la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher.

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Fixer des objectifs en part d’énergie décarbonée

Au lendemain d’une COP28 ayant officiellement reconnu, pour la première fois, le rôle prépondérant que devront jouer toutes les sources d’énergie décarbonées dans la lutte contre le réchauffement climatique, les États les plus volontaires entendent pousser leur avantage, sur deux fronts essentiels.

L’accès aux financements, d’abord : de nombreux dispositifs européens d’aide à la transition énergétique excluent encore le nucléaire, parfois explicitement.

La philosophie des politiques conduites, ensuite : aujourd’hui, dans le cadre du Green Deal européen, l’Europe s’est fixé l’objectif contraignant d’atteindre une part d’ENR dans son mix électrique d’au minimum 42,5 % en 2030, contre 32 % aujourd’hui. Mais « les États membres qui ont déjà une électricité très décarbonée grâce au nucléaire ne peuvent pas intégrer indéfiniment des renouvelables », explique le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, déterminé à mettre sur le tapis cette aberration : la France, avec un mix électrique de 56 grammes de CO2 par kilowattheure produit en 2022, est sommée de faire les mêmes efforts de déploiement de renouvelables que l’Allemagne, dont le mix électrique émettait la même année 434 g COéq /kWh, selon l’Agence fédérale de l´environnement… Soit huit fois plus !

« Nous devons nous poser la question des objectifs nationaux du paquet législatif Fit for 55, et les répartir équitablement », décrypte une source ministérielle. « Nous proposons une nouvelle directive « bas carbone », qui fixerait des objectifs non pas en termes de part de renouvelables, mais en part d’énergie décarbonée. »

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Vingt-cinq années d’émissions de CO2 évitées en France

Un impératif dicté par l’efficacité : dans une étude à paraître, que Le Point a pu consulter, l’institut Molinari, un think tank libéral, calcule que le remplacement des énergies fossiles par le parc nucléaire français a permis à la France d’éviter, depuis 45 ans, environ 25 fois ses émissions en 2022.

Établie sur la base d’une production nette cumulée des réacteurs nucléaires français de 14 200 TWh depuis leur mise en service jusqu’à ce jour, et d’un mix alternatif au nucléaire qui aurait émis 752 gr de CO2 de plus par kWh, l’économie d’émissions liées au nucléaire par rapport au mix alternatif représenterait 10 700 millions de tonnes d’équivalent CO2 depuis le début de la commercialisation de l’électricité nucléaire, soit plus de 25 fois les émissions totales nationales de 2022 (403,8 millions de tonnes éq. CO2).

« L’apport climatique de notre parc nucléaire, depuis qu’il fonctionne, a été totalement occulté », argumente son auteur Georges Sapy, ancien ingénieur chez EDF. « Il est nécessaire d’objectiver ces apports, car si les pouvoirs publics en France en ont enfin pris conscience, ce n’est pas toujours le cas dans la population, qui était encore persuadée il y a deux ans que le nucléaire était une source importante d’émissions. »

Avec 4 gr éq. CO2/kWh pourtant (liés à la construction de la centrale, à son entretien et à son démantèlement), le nucléaire émet 3 à 4 fois moins que l’éolien et 8 à 11 fois moins que le photovoltaïque, documente le Giec. « Un parc éolien terrestre exige également, pour la même quantité d’électricité produite, une empreinte au sol 400 fois plus importante, et le facteur atteint 80 pour un parc photovoltaïque », insiste le spécialiste.

Des calculs confirmés par l’Agence de l’énergie atomique, qui estimait en 2018 que le nucléaire avait permis d’éviter, dans le monde, cinq années d’émissions totales du secteur électrique. À quelques mois des élections européennes, le débat devrait largement animer les meetings.

Article de Michel Bernard paru dans le Point

En car, entre Nantes et la petite ville de Vendée prospère et animée où je me rendais à la fin mars, sur un trajet d’une trentaine de kilomètres je n’ai pas vu une seule éolienne. De retour dans la Meuse, de la gare TGV située sous Verdun à Bar-le-Duc, les yeux se fatiguaient à les compter le long de la Voie sacrée, toujours plus nombreuses, toujours plus hautes. À l’approche de la préfecture, «Ville d’art et d’histoire», « joyau Renaissance», leur pullulement empêche de les dénombrer. Dans le hameau qu’elles dominent, auxquelles elles assurent une rente, des trottoirs généreusement asphaltés, agrémentés de jardinières en ciment, emmènent d’improbables passants vers les prés ; des alvéoles ont été ouvertes à grands frais dans la butte pour y stationner d’éventuelles voitures.Vous cherchez la France périphérique ? Levez les yeux : si le ciel est encombré d’acier et de matériaux composites, vous y êtes

Près de la moitié du parc éolien français se trouve dans les Hauts-de-France et le Grand Est ; pour cette région, sur trois départements principalement: la Marne, l’Aube et la Meuse. L’État, garant de l’équilibre entre les territoires, le constate et le regrette d’un côté, en profite de l’autre. La faible opposition d’une population moins dense, moins diplômée, moins riche, lui permet, conformément à ses engagements européens, d’accélérer dans ces campagnes le développement d’un paysage industriel dont on ne veut pas ailleurs. Vous cherchez la France périphérique? Levez les yeux: si le ciel est encombré d’acier et de matériaux composites, vous y êtes.

Les Meusiens, braves gens, ont considéré favorablement l’installation des premiers aérogénérateurs il y a une quinzaine d’années. Ils avaient l’impression, en ce début du XXIe siècle, d’être enfin « terre d’innovation et d’excellence», après avoir été si souvent champ de bataille. La propagande technologique dissipée par le bruyant tournoiement des pales géantes, ils ont compris: pour eux, l’après-guerre continue.

Le plus fort déploiement de l’éolien en France suit la ligne de front de 14-18. Le no man’s land de la Grande Guerre a été pris au mot par les opérateurs. Ces paysages, si émouvants par leurs souvenirs, rendus à la vie par la ténacité des hommes et des femmes revenus ici, ont été bradés en quelques années. C’est tout juste si l’on parvient à tenir les machines en lisière des nécropoles.

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Ironie de l’histoire, c’est sous l’impulsion de l’Allemagne, sous la pression du courant pacifiste antinucléaire que le développement de l’énergie éolienne s’est emballé avec l’objectif de la substituer à brève échéance à l’atome, absurdement proscrit. L’Allemagne, en vingt ans, s’est défigurée à grande échelle, non sans fortes disparités régionales là-bas aussi: à foison dans le Nord et le centre, peu dans la riche Bavière, très peu dans l’opulent Bade-Wurtemberg. Des voix s’élèvent outre-Rhin pour protester, elles ont moins d’audience qu’en France et sont culpabilisées plus facilement. On ne peut s’ôter de l’idée que le saccage des horizons en Allemagne participe de l’expiation de l’horreur nazie. La mortification de la patrie charnelle, au profit de celle des valeurs, la patrie constitutionnelle théorisée par Habermas, est une politique.Les excités qui balancent des boîtes de soupe sur « Les Tournesols » de Van Gogh ou « La Jeune Fille à la perle » de Vermeer font infiniment moins de mal à la beauté du monde que les industriels subventionnés qui gribouillent sur une ligne d’horizon, bétonnent une terre pure de toute construction depuis l’origine des temps

L’Europe se met à l’unisson. Les patries sont suspectes, comme en Allemagne elles doivent s’humilier. C’est pourquoi l’argument de la beauté du pays, valeur cardinale sur laquelle s’ouvraient les manuels de géographie distribués par la République dans ses écoles, non seulement n’est plus agissant mais passe pour douteux. La destruction du paysage français a des motivations moins éloignées qu’il n’y paraît de la déconstruction de son histoire. Un être humain se déracine par le ciel ; on le dégoûte de la terre en lui gâchant l’horizon. En Vendée, en Alsace, au Pays basque, en Corse, l’orgueil local est assez vigoureux pour assurer une résistance efficace à la pollution du ciel. Sur la Côte d’Azur et en Provence, le tiroir-caisse du tourisme a mis à l’abri la région. La facilité fait pousser les gigantesques moulins où il y a moins de vent, mais où se trouvent des communes, des agriculteurs suffisamment démunis ou cupides pour donner leur ciel, qui est aussi celui des autres, contre quelques sous. La France, à contrecœur, sous la contrainte, bat sa coulpe sur les collines, les plateaux où elle a si souvent fait face à l’envahisseur. À la Vaux-Marie, sur le plateau où commence la tragédie de Ceux de 14, s’élève une extraordinaire densité d’engins qui ronflent tout le jour et clignotent la nuit. Un son et lumière sans âme sur les champs de mémoire.

Les excités qui balancent des boîtes de soupe sur Les Tournesols de Van Gogh ou La Jeune Fille à la perle de Vermeer font infiniment moins de mal à la beauté du monde que les industriels subventionnés qui gribouillent sur une ligne d’horizon, bétonnent une terre pure de toute construction depuis l’origine des temps. Un coup d’éponge annule l’inconséquence des premiers, les dommages causés par les seconds sont durables et, pour le sous-sol, quasiment irréversibles. En octobre, le tableau de Monet, Les Meules, exposé à Potsdam, a été aspergé de purée de pommes de terre par des activistes du climat. Le peintre, qui avait la religion de son jardin et tenait la grâce d’un paysage pour infiniment supérieure au chef-d’œuvre le représentant, en aurait été moins bouleversé que de voir la dégradation de ses motifs. Combien de temps encore parviendra-t-on à éloigner de la cathédrale de Chartres les monstrueux épis qui hérissent la Beauce, combien de temps des coteaux de l’Epte à Giverny? Faudra-t-il pour cela abîmer un peu plus ces ciels voyageurs, pas moins précieux, pas moins indispensables aux gens du Nord et de l’Est, que la douceur de l’horizon à leurs compatriotes de la Côte d’Azur ou de l’Aquitaine?

Extraits d’un article du Point – Kervasdoué – 29 juin 2022

L’intégralité de l’article : https://www.lepoint.fr/invites-du-point/kervasdoue-aux-sources-politiques-de-la-crise-de-l-energie-29-06-2022-2481517_420.php

Voici quelques extraits de cet article :

C’est encore la Commission européenne qui fait croire, Allemagne oblige, que d’un point de vue écologique le nucléaire et le gaz se valent ; or les émissions de CO2 du gaz par TWH produit sont 120 fois supérieures à celles du nucléaire et le rapport est le même pour les morts par TWH, le nucléaire étant 100 fois moins mortel ! (……)

L’autre facteur aggravant vient de l’influence de l’écologie politique, dont le premier commandement a toujours été de bannir tout usage de l’énergie nucléaire civile. Grâce à l’efficace combat médiatique des écolos, la France s’est progressivement sentie coupable de ce parc nucléaire qui ronronnait et fournissait de l’électricité à bas prix. (……)

Le grand et curieux projet des gouvernements français de ces deux dernières décennies fut donc, en financement l’éolien et le photovoltaïque, de décarboner une électricité qui l’était déjà, grâce au nucléaire et aux barrages hydroélectriques. (……)

C’est aussi ce combat permanent contre le nucléaire des écologistes politiques qui a influencé Emmanuel Macron quand il a décidé la fermeture de la centrale de Fessenheim. Il se situait alors dans la droite ligne de François Hollande qui, assisté par Ségolène Royal, voulait fermer – outre Fessenheim – « certaines » centrales (de l’ordre de 16 !) pour qu’en 2025 l’énergie nucléaire française ne contribue plus qu’à 50 % à la production d’électricité. (……)

Quoi qu’il en soit, l’abandon du nucléaire allemand pour le gaz russe, le faible rendement des énergies alternatives et les mécanismes du marché de l’énergie en Europe conduisent au rationnement et à une forte croissance en France du prix de l’énergie, même si, grâce aux décisions des années 1970, elle jouit d’un bon mix électrique que l’on s’apprêtait à massacrer, au nom de croyances infondées. (……)

LETTRE OUVERTE

A l’attention de Monsieur le Président de la communauté de communes du plateau picard.

le 7 octobre 2021

Monsieur,

Le développement anarchique de multiples projets éoliens sur le territoire de la communauté de communes provoque la colère et l’opposition d’une partie grandissante de la population.

Vous ne pouvez pas ignorer que continuer de hérisser nos campagnes d’éoliennes toujours plus hautes n’aura aucun impact significatif sur la baisse des émissions de gaz à effet de serre dans notre pays et il n’est plus possible non plus, d’occulter davantage les préjudices et les risques que cette prolifération fait peser sur la population.

Les subventions et autres avantages déversés à fonds perdu dans cette industrie dont bénéficient principalement les industriels et les propriétaires fonciers sont financées en partie par de l’argent public. Mais ce financement provient surtout des taxes additionnelles payées par les clients et qui ne cessent d’augmenter provoquant une hausse continue du prix de l’électricité qui exposera les plus fragiles à la précarité énergétique.

De plus, nous sommes surpris que vous donniez crédit à cette obstination coupable du gouvernement qui consiste à continuer à investir dans cette énergie coûteuse et inutile (alors même que plusieurs pays européens sont en train de réviser cette orientation) en délaissant la filière nucléaire dans laquelle notre pays excelle, qui fournit de l’énergie à un prix compétitif et dont le bilan carbone est bien plus favorable. Cet aveuglement amènera, à terme, un risque de pénurie pour tout le monde et sera un handicap pour notre pays dans l’avenir.

Soyez convaincu que ces sommes d’argent, éphémères, aussi attractives soient-elles, ne compenseront jamais les nuisances subies durablement, par l’ensemble de la population.

Et loin d’enrichir notre territoire, c’est plutôt l’effet inverse qui se produira à brève échéance.

Car les personnes ayant les moyens de vivre et d’investir ailleurs qu’au milieu des éoliennes le feront.

Le mandat que vous ont confié les maires et, à travers eux, une partie de la population vous oblige et comporte l’engagement de protéger les habitants et notre cadre de vie commun.

C’est pourquoi nous vous demandons de proposer à votre assemblée le vote d’un moratoire visant à stopper tous les projets éoliens en cours sur le territoire du plateau picard.

En vous engageant dans cette démarche courageuse, vous ferez de notre communauté de communes un exemple pour le reste du territoire.

Respectueusement

Pour l’association

Eric Mijoule

Transmise pour information aux maires et aux élus des communes du plateau picard

Association CHAD pour la protection de l’environnement et du cadre de vie du plateau picard

37, rue Neuve 60190 Cressonsacq